SU1ES ET SOIElllES.
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diüicile de juger du degre de soliditd d’une industrie que les lois de
douane rendent ä peu pres maitresse des marches du pays, et que la con-
currence etrangere ecarte de ceux de l’exterieur. La fabrique de Moscou
nous interesse n^anmoins; eile est pour nous une rivale en Russie meine,
et celte rivale n’est pas sans valeur.
Les failles, les taffetas,les satins, en ont fourni la preuve; plusieurs de
ces etoffes etaient vraiment belles. L’habilete technique est moindre dans
les tissus destinO a une consommation plus courante, notarament dans
ceux qui sont rayO ou quadrilles et legers; mais c’est beaucoup ijuc d’en
etre venu a faire assez bien ces articles pour que, le droit de douane ai-
dant, ils remplacent les soieries etrangeres. 11s prennent surtout la place
d’eloffes de fabrique allemande ou suisse. Ln demande des notres reste a
peu pres la meme. Notre attention s’est arret^e sur des satins double face
rayes (les rayures ont plu de tout temps aux peuples de l’Asie centrale) et
sur des soieries broch^es, souples, serr^es et ornees de palniettes.
Les draps d’or et d’argent et les etoffes brocbees pour ameublements
n’ont pas tous garde le meme caractere; on trouve dans cette direction les
marques d’efforts qui n’ont pas et«i sans hardiesse.
Les toiles d’or, les draps d’or ou d’argent , ras, frises ou broches, dil-
ferent peu de ceux d’origine byzantine ou italienne qui avaicnt cours au
Moyen äge et a la Renaissance.
On ne trouve chez aucun peuple d’aussi somptueuses etoffes pour les
vetements ecclesiastiques. La Russie, qui a eu, meine aux premiers ages
de son histoire, des liens etroits avec les Grccs, qui s’est approprie leur
culte, leurs pompes religieuses el leurs costurnes sacerdotaux, a recu aussi
de Ryzance des ouvriers, des metiers et des traditions dans l’ordre tech
nique. Moscou a gardii fidelement dans la suite des temps cet heritage du
vieil ernpire grec, et a montre plus d’une fois, en i85i surtout, ä l’Oc-
cident surpris des tissus marques au coin de l’art byzantin le plus pur. Le
fabricant obeit pour le dessin a une regle severe, et l’antiquite de la forme
n’est pas la moindre originalite. La Russie entretient cette fabrication se-
culaire avec un soin jaloux, et la prohibition a Oe maintenue au tarif de
douane pour les produits de ce genre.
Le manufacturier russe reprend tonte sa liberte dans le tissage des
etoffes pour meubles, et il en a use longtcmps pour faire des copies ser
viles des tissus de Lyon; la reproduction a ete generalement fort au-des-
sous du modele. La fabrique de Moscou a ete plus heureuse dans son
imitation des etoffes allemandes; eile a fait les tissus de re genre, non-
seulement beaucoup micux, mais ii meilleur mar che, si bien que leur im-
portation a notablemeut diminue.