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Ficjure 2: juiye de constantinople.
I lusieurs quartiers de Constantinople sont presque entierement liabites par des
Israelites. Bien qu’il ne soient pas parques, comme au moyen-age, dans des enceintes
quil leur est interdit de franchir, mais qu’au contraire ils jouissent completement de
la libeitc de sc logei ou bon leur semble, les Juifs de Constantinople aiment a se grouper
en petites societes exclusives, en centres religieux et nationaux. Ils se plaisent ä se
considerer toujours comme un peuple particidier separe des autres, le peuple de Dieu,
et se donnent eux-memes le nom de Iahoudi, quoique ce nom soit pris par toutes les
autres communautes en mauvaise part. De preference, quand on veut etre poli—et la
politesse estun devoirsacre chez les Turcs—on les appelle bazirghian (negociant).
Les piincipaux quartiers choisis par les Juifs, ä Constantinople, sont Balata et
Haskeui, dans la Corne d’or, et Kouzgoundjouk, a l’entree du Bosphore, pres de
Scutari.
On compte parmi les principaux banquiers, les plus riches negociants, et les
employes et fonctionnaires de la Sublime Porte, bon nombre d’Israelites. Ceux-ci sont
appelles effendi et traites par leurs collegues musulmans et chretiens sur le pied de la
plus parfaite egalite. Les banquiers et negociants israelites habitent Pera et Galata ;
ils suivent en tont les usages europeens et prennent serieusement a coeur Finstruction
et le bien-etre de leurs coreligionaires, en faveur desquels ils fondent des ecoles et n’e-
pargnent aucun sacrifice. La classe moyenne se montre tres sensible a ces bontes, et y
repond avec empressement. La bourgeoisie israelite a des cercles ou toute personne
bonnete, patronee par deux membres, peut-etre admise sans aucune difficulte, a quelque
religion et a quelque nationalite quelle appartienne. Ces cercles sont cites parmi les
mieux frequentes.
En revanche, les Juifs de la classe inferieure, descendants pour la plupart de refu-
gies espagnols ou portugais, sont encroütes dans une ignorance systematique et infatues *
de leur Suprematie politique et religieuse sur tous les autres peuples du monde. Ils
repoussent avec entetement toute innovation, tont progres, toute amelioration, soit
mtellectuelle ou morale, soit meme materielle.
Les moeurs et les usages de cette classe sont presque les memes qu’au moyen-age.
Ils se croient toujours persecutes et fuient le contact des etrangers — c’est-a-dire de
tont ce qm n’est pas Iahoudi—plus que la peste. Nest pas considere par eux comme
Icthmdi tout ce qui n’est pas scrupuleusement attaclie aux superstitions des mille et
mi e commentaires fantastiques du Talmud, y compris, et surtout, leurs bienfaiteurs,
ceux qm les secourent dans leur detresse et qui cherchent ä les faire sortir de leur
ignorance crasse.