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maladroite du bourgeois de Bosna-Serai. On voit que le tailleur et la brodeuse n’ont
rien epargne pour la reparer; ils se sont efforces en vain d’assortir des nuances inassor-
tissables; ils ont dissumule autant qu’ils ont pu le fond des etoffes, si desagreable a
voir, sous les caresses des ornements multiplies dont ils l’ont enrichi. Ont-ils reussi ?
C’est douteux; mais enfin, ä l’impossible nul n’est tenu.
Figure 3: dame de bosna-serai.
Mieux inspiree que le bourgeois, la dame de Bosna-Serai a clioisi les etoffes de son
costume parmi celles du pays. Aussi rharmonie des couleurs s’est-elle etablie
sans peine, et tont, dans ce costume, coupe, tons, ornements, est-il parfaitement
a l’unisson.
II se compose d'un feradje noir a manches etroites avec collet carre retombant
par derriere comme la dalmatique d’un diacre. Une large bordure en galon d’or ou-
vrage le rehausse. Sur le fer mene ou gilet ferme, de couleur de pourpre, s’epanouis-
sent des fleurs et des arabesques richement brodees en soutache d’or et encadrees
dans une bordure droite en passementerie d’or. Un ydek ecarlate, galonne d’or, s’ouvre
autour des seins. Sous ces deux gilets, on voit le haut de Yentari en etoffe de soie dite
koutnou, ä raies blanches sur un fond violet clair. La jupe, serree a la taille par une
ceinture en galon d’or, avec boucle en filigrane d’argent, s’ouvre par devant, et laisse
un peu a decouvert les plis moelleux du chalvar de cachemire ecarlate, s’arrondissant
autour de tchedik (bottines molles) de forme haute, dont l’extremite seule est cachee
par des paboudj de maroquin jaune, tres echancrees.
Pour coiffure, la dame de Bosna-Serai a le fez extremement bas de forme, ä pus-
kul de soie blanc etale circulairement, tombant jusqu’a un demi-centimetre du bord
environ, excepte par derriere, ou il est assez long pour couvrir toute la partie poste-
rieure du cou.
Qu’eiles soient musulmanes ou chretiennes,les dames Bosniaques ne portent jamais
de voile.
Chose incroyable probablement, mais vraie, le costume de la dame de Bosna-
Serai, malgre l’or et les broderies qui l’enrichissent, ne coute pas plus de 500 piastres
(100 francs).
Decidement, ce brave bourgeois qui a jete dans l’eau une somme de 144 francs
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