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tour de sa tete. Elle porte ses cheveux deroules magnifiquement, comme un manteau
naturel de soie noire. La veste (mintan) de couleur claire, est agrementee de palmes
d’or. Son chalvar et son entari, ä grands ramages, est un defi des fabricants de soie de
Brousse ä ceux de Lyon; une mince ceinture en chäle etreint doucement ses hancbes ;
et des paboudj rouges, releves en pointe, chaussent ses pieds.
La veste seule de ce costume etant brodee, son prix ne monte pas, malgre la
splendeur des etoffes, au dela de 1,500 piastres (300 francs.)
Figure 3: seüs.
Un des luxes particuliers a FOrient, oü les chevaux ont un arbre genealogique, un
pennon comme les familles princieres de FOccident, est le seis ou sdis, vulgairement dit
palefrenier.
II ne faut pas qu’un seis, par le neglige de sa tenue, se montre par trop au dessous
de ses illustres pensionnaires. Autant que possible, il doit-etre aussi beau qu’eux. A
defaut de noblesse de race, qui n’est pas son fait; a defaut de noblesse de formes, qua-
lite plus rare chez l’homme que cliez le cheval, il faut du moins qu’il rachete son infe-
riorite par un eclat d’emprunt, puise dans la bourse de ses maitres.
Ces derniers ne lesinent pas, car ils connaissent le proverbe franc : tel maitre; tel
valet; or, tout se retourne, les proverbes comme les habits.
Aussi le sais rayone-t-il sous son djamadan de Velours amaranthe constelle d’or,
laissant glorieusement passer les manches blanches et empesees d’une chemise parisienne
sous la protection d’un tchepken de drap fin borde de fines passementeries. Son large
potour se retrecit le long des jambes pour y dessiner de fausses guetres en broderie de
soie, qui descendent jusques sur la pointe de ses bottines ä la franka. Il incline crane-
ment sur le soureil gauche un fez de couleur de cinabre et de forme azizie. Une cein
ture tunisienne, lache comme celle de Cesar, orne ses larges flaues. Bien outrageuse-
ment fier serait le noble coursier qui recuserait ses Services.