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boutonne sur sa poitrine par un seul bouton, proclame qu’il fait fi du qu’en dira-t-on.
Un salta a manches etroites,un chalwar de nuance discrete,tombant negligemment sur le
haut de ses chaussettes Manches, a distance respectueuse de ses souliers noirs, temoignent
de la simplicite de ses gouts, que rien dans l’ensemble de son costume ne dementirait, si
ce n etait cette fastueuse ceinture, dont l’etalage de soie, d’or, et de pompons outrecui-
dants trahit malgre lui des penchants ambitieux contenus par le Sentiment du devoir
qui lui commande de gagner d’abord le plus d’argent possible—mais qui n’attendent
qu’une occasion favorable pour eclater au grand jour de la publicite.
Figure 2: haham de smyrne.
La Smyrne ancienne, dont ont voit les ruines sur le mont Pagus, est un ouvrage
des rois grecs. Projetee par Alexandre, sa construction fut entreprise par Antigone et
accomplie par Lysimaque. Ravagee par les guerres civiles et les tremblements de terre,
eile fut reparee successivement par les empereurs romains et byzantins. II n’en reste
plus gueres aujourd’hui que l’ancien chateau, dont une partie appartient a l’edifice
primitif bati par les grecs ; le reste est un ouvrage byzantin du temps de Jean Com-
nene. Les Chevaliers de Rhödes, qui s’etaient empares du chateau apres la conquete
de Smyrne par l’emir Aidin, l’ont repare de nouveau en 1332 de l’ere Chretienne.
C’est a tort qu’on l’attribue aux Genois, bien qu’ils aient aussi possede Smyrne pen-
dant quelque temps.
Successivement cette ville fut ravagee et son port com Me par les Tatars de
Timour Leng, puis brulee par la flotte chretienne de Pietro Moncenigo, et enfin
conquise definitivement par les Turcs Ottomans, qui la possedent depuis plu-
sieurs siecles.
Aujourd'hui, Smyrne, descendue de la montagne au bord de la mer, est presque
entierement composee de maisons de bois, que l’incendie force de temps en temps ä
renouveler. Elle est di^isee en plusieurs quartiers. Les ffancs, c’est-a-dire les europeens,
habitent le port oü sont aussi les demeures des consuls. Les Turcs ont choisi pour s’y
etablir la base de la montagne, et les Grecs sont a lest de la ville. Les Juifs n’ont pas
manque de se placer du cöte oppose.
Dans une ville commercjante comme Smyrne, oü toutes les productions de l’inte-
rieur viennent affluer pour l’exportation, et se heurter contre celles que l’etranger y
envoie en abondance pour l’importation, les Israelites ne pouvaient que prosperer. Aussi
y sont-ils nombreux. Ils ont des ecoles, des synagogues, et naturellement des haham,
savants docteurs es-nebulosites plus ou moins mystiques.
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