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laissant treniper dans la boue, et preserver en meme temps des eclaboussures le chalvar,
pmdemment enfonce dans l’entonnoir ä retroussis jaunes des bottes.
II est ä croire aussi que le climat moyen de Koniab est tempere; plutöt froid que
chaud, toutefois. Les indices en sont fournis par la raisonnable epaisseur du drap des
differentes pieces du costume. Ils sont corrobores par l’aspect du mintan, duement
ferme sur la poitrine, bien assujetti sur les reins par une ceinture de soie tunisienne,
bonne egalement contre le serein et contre l’ardeur du soleil qui souleve des vapeurs
malsaines en pompant l’humidite. Le salta et le djubbe sont ouverts ; mais il est facile
de les fermer au besoin par le meme moyen, et alors on se trouve abrite contre la
pluie ou la neige.
La coiffure elle-meme est ä double usage, selon l’occurrence. C’est une serviette
brodee (pechkir) que Ton roule autour du fez en en laissant pendre les bouts par der-
riere. S’il fait du soleil, on ne craint pas les maux de tete. Si la bise est rüde, au con-
traire, on a le crane au cbaud, et Ion nargue le coryza.
Figure 2 : cavalier musulman de koniah.
Le cavalier musulman de Koniah est un de ces auxiliaires volontaires de la force
publique, qui sont employes concurremment avec les zapties (gendarmes) pour servir
d’escorte aux autorites, aux pelerins, aux voyageurs, pour porter des ordres, pour pro-
teger les convois de marchandises. Son silahlik, sans etre garni avec autant de pro-
fusion que celui du zeibek, est pourtant assez respectable pour imposer aux malin-
tentionnes. Les armes qu’il renferme n’ont rien de somptueux; les crosses des pis-
tolets sont en cuivre, arrondies en pomme et terminees en pointe, comme des toupies
renversees ; le fourreau du couteau yataghan est de simple maroquin vert, sa poignee
en os ; mais la lame, de fin acier, est bien trempee, souple et tranchante. Rien n est
lä pour la parade : sauf peut-etre le ficheklik (cartouchiere), brochant sur le tout et
laissant pendre avec quelque velleite d’ostentation ses franges de cuir colore. Cette
vanite est bien excusable, car son but n’est autre que de prevenir des attaques in-
considerees, en montrant d’avance aux agresseurs que les munitions de guerre ne
manquent pas.
Peut-etre le cavalier musulman de Koniah n’est il pas, pourtant, absolument a
l’abri de toute reproche d’affectation de coquetterie ou de bravade. En effet, le mou-
choir et la serviette qui etalent le long de son clialvar leurs resplendissantes brode-
ries, constellees de paillettes d’or, semblent dire au passant qui les convoiterait:
voici des richesses, ose donc les prendre !