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Figure 3: paysanne de baidjas.
Ce n’est pas celle-ci qui se permettrait un pareil massacre. Elle a, du reste, Dien
merci, le moyen de porter des yemeni, et ce n’est pas de ce cöte-lä qu’elle epargne, ou
bien le maroquin n’est pas eher ä Baidjas. Certes, il est bon d’etre chaussee ä l’aise,
on le voit assez.
La coiffure de cette dame offre une particularite originale: le bach askissi, tres re-
pandu du reste en Thrace et en Macedoine. C’est le chignon local. A l’instar de certains
chignons des mieux portes en Occident, il est compose d’etoupes; mais on ne cherche
pas a les cacher sous les cheveux, dont eiles sont chargees de grossir economiquement
le volume. En Orient, on est plus sincere. Ici, letoupe se montre naivement. Sans
se meler ä la laine, eile s’y marie en longues tresses rondes, en cordelettes parsemees
d’un peu de clinquant, de quelques fauxsequins de cuivre jaune oü l’on a grossierement
represente un petit bateau, entoure d’une inscription en allemand. Des perles de verre
parachevent cette parure sans pretention, inventee par quelque perruquier de Tage
d’or.
Cela se pose derriere la tete, et retombe le long du dos, en napp e, en cascades,
comme pourrait le faire une veritable chevelure
“ . . . qui l’inonde ”
“ Plus longue qu’un manteau de roi. ”
En somme, cela fait bien. On y joint un petit fez ä puskul etale et ffise, et l’on
roule en turban, autour de ce fez, un enorme bach eurtussu de grosse laine, qu’on noue
sous le cou pour se preserver des angines.
Lefistan (robe) tout droit, sans aucun ornement, a letort de cacher completement
les broderies de la chemise. Les paysannes coquettes rachetent cette imperfection en
retroussant le bas des manches de leur salta, ce qui pennet d’y etaler du moins les
eclatants dessins des poignets de cette chemise; c’est toujours autant de gagne. Un
tablier a carreaux, une ceinture de feutre rouge completent ce costume, montant, avec
la merveille de l’art capillaire citee plus haut, le bach askissi, a la somme fabuleuse de
210 piastres (42 francs).