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EXPOSITION UNIVERSELLE DE VIENNE.
la France, des cr^neaux en saillie, ouverts en dessous et soutenus par des
consoles rapprochees. Qu’on se represente une immense arcature ogivale,
derri&re laquelle s’eleve un rnur en retraite de deux pieds environ, au-
quel les piliers des arcades servent de contre-forts : l’intervalle entre une
arcade et la muraille est un mächicoulis. Ce Systeme, qui avait l’incon-
v^nient de ne pas batlre le devant des contre-forts et de laisser ainsi des
points accessibles aux assaillants, pr^sentait cependant une defense formi-
dable; au lieu de pierres et de traits, on pouvait jeter, par ces longues
rainures, des poutres Enormes, qui, tombant horizontalement, devaient
balayer dix tichelles a la fois ou bien 4craser d’un seul coup une rangee
de mineurs, s’il s’en trouvait d’assez hardis pour essayer de saper le pied
des remparts.
Mais la defense principale du palais consistait dans ses tours, dont
l’inebranlable solidite a r4sist4 pendant plus de quatre siecles ä toutes
les causes de destruction; eiles sont carrees, comnie cell es des remparts
d’Avignon, mais d’une epaisseur et d’une olevation telles, qu’elles pouvaient
defier la sape et les projectiles lanctis par les engins alors en usage. Le
palais des Papes en compte sept.qui sont: i° les tours de Trouillas, 2° de
la Gache ', 3° de Saint-Jean, h° de Saint-Laurent, 5° de la Cloche, 6° des
Anges, 7 0 de l’Estrapade.
La rudesse et l’austerit^ ext&'ieures de ce majestueux edifice olfraient
un frappant contraste avec la richesse et le faste de sa dticoration inttS—
rieure. Froissard nous le depeint sous ces deux aspects : «C’est, dit-il, la
plus forte et la plus belle maison du monde.» Les murs de ses cbapelles
et de la plupart de ses salles etaient couverts de fresques admirablement
ex^cut^es par quelques-uns des plus illustres representants des grandes
ecoles qui, ä cette £poque, faisaient la gloire de Florence, de Pise, de
Sienne, de Perouse. S’il y a tout lieu de croire, en elfet, que les papes
franfais ne demanderent pas ä l’ltalie des architectes qu’ils trouvaienl
plus experimentes et plus habiles dans leur propre pays, il est bors de
doute qu’ils lui emprunterent, pour l’embellissement de leur demeure,
des pcintres beaucoup plus avanc^s dans leur art qu’on ne l’etait alors en
France. C’est a tort, il est vrai, que Ton a attribue quelques-unes de ces
fresques ä Giotto, cet artiste 4tant mort ä Tdpoque ou s’elevait le palais;
mais Simone Memmi, et quelques autres de ses meilleurs disciples, ont
certainement travaill^ plusieurs ann^es ä la cour d’Avignon. Ce qui reste
1 Ce nom lui venait de ce qu’elle aervait de
guette. Du haut de la tour de la Gache (la
plus voisine de la fafade de Notre-Dame-des-
Doms et la plus elevee) on donnait, ä son de
trompe, le signal du couvre-feu, et on aver-
tissait les habilants en cas d’incendie ou d’a-
larme.