derne dans son esprit et dans ses effets, etqui, comme dans loutes les e'coles,
a eu ses pliases et ses revolulions, c’esl-a-dire son enfance, sa maturite et sa
decadence.
Par malheur, les monuments de la sculpture sont encore plus fragiles que
ceux de l’architecture. Les guerres de religion et nos tourmentes revolulion-
naires ont laisse debout quelques edifices; elles n’ont presque point epargne
de slatues; et, d’ailleurs, ces statues n’eussenl-elles pas represenle' des per-
sonnages religieux et des sujets sacres, de combien d autres cbances de des-
truction n’etaient-elles point entourees? Non-seulement elles etaient sculpt^cs
en pierre, souvent en pierre friable ou poreuse, inais encore on les placait
plutot en dehors qu’au dedans de l’e'glise, du cdte du portail; et, par conse-
quent, le vent d’ouest, la pluie, la grele, et, dans Tete, la mousse et les li-
chens, tout devait contribuer ä les älterer, ä les ronger uu peu. Aussi laut-il
s’estimer heureux quand le hasard vous fait decouvrir dans un coin bien abrile,
et oü les coups de marteau n’ont pu atteindre, quelques Fragments de cette
noble et belle sculpture.
Ce plaisir, cette bonne fortune, j’en ai joui a Reims. Une partie du portail
de la cathedrale exigeant quelques reparalions, uu echafaudage a ete dresse
jusqu’ä mi-hauteur de la faqade; je suis monte sur cet echafaudage, et, dans
les enfoncements des ogives, des festons et autres ornements architectoniques,
j’ai trouve une profusion de bas-reliefs et de statues dont le style, le caractere
et l’expression m’ont cause l’admiration la plus vive. Le costume, aussi bien
que le genre de travail, annonce que ces figures sont du xm e siede, laged or
de nolre sculpture nationale, et, grace a la maniere dont elles ont ete abri-
te'es, elles sont presque toutes dans un elat parfait de Conservation.
A moins d’etre monte sur cet echafaudage, il est impossible de se douter de
l’existence de ces chefs-d’ceuvre; ils sont a une si grande bauteur, que, du bas
de l’edifice, c’est ä peine s’ilssont visibles. Dans la partie inferieure de la la-
cade, il y a bien aussi des statues, mais elles ne sont guere propres a faire
soupconner celles que la vue ne peut atteindre. A tres-peu d’exceptions pres,
elles ont ete restaurees ou refaites, par des ouvriers mediocres, au xv" siede
et a d’autres epoques. 11 en est rneme beaucoup qui datent du sacre de
Louis XIV.
Ce serait donc a la fois rehabiliter les auteurs de ce beau monument et la
grande dpoque qui le vit elever, que de faire connaitre au public, au moins
par ecbantillon, quelles etaient les veritables sculptures de la calhe'drale de
Reims et du xin® siede. Dans cette intention, j’ai prie M. Se'rurier, l’ärchitecte
charge de la restauration de la facade, de ne point faire enlever l’echafaudage
avant le printemps, quoique les travaux soient termines, et je vous deman-
derai la permission, Monsieur le Miuislre, de faire mouler un cerlain nombre
de ces bas-reliefs et statues. Je ne Sache pas d’autre maniere d’en donner une
image vraiment fidele. Le dessin le plus exact pourrail etre accuse de super-
cherie; on sera force de se rendre a la vue d’une empreinte, d une contre-
epreuve.