506 EXPOSITION UNIVERSELLE DE VIENNE.
)a richesse de Compiegne. On y voit cependant encore un charmant petit
portail de l’ancien Hötel-Dieu, ogive d’une gräce et d’une purcte toutes primi
tives; un grand magasin, jadis eglise des Minimes, et dont j ai eile plus haut
le portail, a propos de peintures qui le decorent 1 ; enfin une enorme tour qui
faisait partie des vieux remparts et qu’on appelle h tour de la Pucelle, parce
que, dit-on, c’est en Fescaladarit que Jeanne d’Arc se laissa prendre. De tous
les monuments que je viens de citer, celui-ci est peut-elre le plus en peril: ce
n’est pas laute de solidite, il est assez niassif pour durer encore mille ans; ce
li est pas non plus que son proprietaire 1c neglige; cest, au eontraire, parce
qu’il en a trop desoin. 11 s’occupait, lors de mon passage, a faire boucher en
pans de bois une large et belle echancrure qui divisait cette tour du haut en
bas; puis il allait la faire recrepir, la couvrir d’un grand loit de pigeonnier et
etablir dans cette vaste rotonde, divisee par etages, un salon de trois Cents cou-
verls, des billards, des salles de danse. Heureux, me dit-il, de pouvoir faire
tout cela en memoire de la Pucelle et pour Thonneurde la ville de Compiegne.
Entre Compiegne et Noyon, on apercoit sur la droite un monument ce-
lebre, l’antique abbaye d’Ourscamp, aujourd’hui magnifique filature. Les bati-
ments claustraux, pour la plupart assez modernes, sont occupes par des
metiers; fe'glise est en ruine, mais sous la garde de personnes de goüt, qui
Teparguent et la respectent. On a conserve', saus cherchera en tirer trop gros-
sierement parli, une grande et belle salle, dite la solle des Morts ou des Mores,
car on varie sur le sens du mot. Apres avoir examine les proportions et la dis-
position de cette salle, je ne crois pas que, coinine on le raconte, eile ait e'te
ainsi dire, savoir : la nef et le choeur, qui ap-
parliennent au xin” siede; du raoins les piliers
qui supportent les arcades ogives out encore
cet aspect robuste, cette variete de chapiteaux
qui se marient ordinairement au plein cintre.
Les ogives elles-mömes sont toutes massives
et ä gros boudins, cornme dans la cathedrale
de Senlis. Un autre point de ressemblance
entre cesdeuxeglises, c’est queleurscollateraux
se terminent, du cöte des transepts, par une
arcade ogive extrdmement recourbde vers sa base
etpresque en fer ä cbeval. La merae ogive se
retrouve a la meine place dans la cathedrale de
Noyon, et dans ces trois eglises il n’y a pas
d’aulres arcades ogives de cette forme.
Gelte observation, quoique fort minulieuse,
n’est pas sans interel qnand on eludie toutes
les Varietes de l’ogive et ses differents em-
plois.
11 y a cetle difference entre l’eglise Saint-
Jacques de Compiegne et la cathedrale de Sen
lis, que la nef de Sainl-Jacques est longue et
le cbocur extremement court, tandis qu’a Sen
lis le choeur est assez profond, et la nef, au
eontraire, singulierementcourle. Le plan offre
le dessin d’une croix grecque; celui de Saint-
Jacques est en forme de croix laline.
On remarque dans cette eglise un petit ta-
bleau fond d’or, dans la maniere de l’ancienne
ecole allernande, qui n’est pas sans merite;
c’est un Jesus faisant toucher sa plaie, non ä
saint Thomas, rnais ä sa mere et ä saint Jean.
Un autre tableau tres-grand, unpeu rougeätre,
mais qui ne manque pas de style et de cha-
Icur, represente Jesus-Christ chez Joseph d’A-
rimalhie.
1 Cette ancienne eglise est aujourd’hui la
propriete de deux personnes qui l’ont separee
en denx, et. qui en ont fait, l’une un maga
sin , l’autre une espöce d’entrepot ou de han-
gar. Il serait fächeux qu’ellcvint a etre detruite.
La corniche de la nef est d’une grande ele-
gance; ce sont de petites ogives a vivo arßte
faisant l’ollico de modillons et disposdes en res-
saut avec beaucoup de gout. La fendtre qui
surmonte le porcheest aussi Ires-remarquahle
par le caraclere et la qualite de ses moulures
et des ornements sculplds.