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EXPOSITION UNIVERSELLE DE VIENNE.
avertissements des gens de goüt, en depit meine des rdclamations du hon sens
le plus vulgaire. La Commission, Monsieur le Ministre, ne peut s’empecher
de vous rappeier ici l’inqualifiable obslination du conseil general du Loiret et
du conseil municipal d’Orleans a demolir Tancien Hötel-Dieu de cette ville.
Que Tarcbitecture si ele'ganle de ce monument, que ses dispositions si com-
modes et si parfaitement appropriees ä sa destination, n’aient pas ete appre-
ciees, on le comprend ä peine; rnais qui pourrait croire que, dans une grande
ville, a trois beures de la capitale, on ait pu oublier tonte idee de saiue eco-
nomie et de bonne administration, au point de persister pendant trois ans ä
renverser un edifice vaste, solide, susceptible de recevoir mainte destination
ulile? C’est cependaut le spectacle que vient de donner le conseil municipal
d’Orleans. Le pretexte de cette deslruction, c’est le besoin de faire une place
autour de la cathedrale. En vain la Commission a-t-elle represente qu’il etait
possible, sans rien abattre, de faire cette place, de la faire reguliere, de lui
donner des dimensions convenables et une disposition monumentale. Elle n’eüt
point hesite, sans doute, a vous proposer de faire, aux frais de l’Etat, l’acqui-
sition du monument, si le prix que la ville d’Orleans y mettait n’eüt pas de-
passe de beaucoup toutes vos ressources. Toutes les representations ont ete inu-
tiles devant un corps municipal qui croit apparemment agrandir sa ville en la
dotant d’une espece deplaine pavee, sur laquelle, par un rare oubli des con-
venances, on met en regard la salle de spectacle et la cathedrale. A une epoque
oü toutes les traditions d’art et de style e'taient perdues, Tarchitecte de cette ca-
tbe'drale avait respecte' Tancien hospice d’Orle'ans. Ce que le mauvais goüt du
xviii" siede n’avait pu faire, l’ignorance et Tetourderie du xix'Tauront accompli.
Si le goüt des arts fait des adeptes, le vandalisme a les siens. L’exemple fu-
neste dorine par le conseil municipal d’Orleans allait etre imite par celui de
Beaugency. La, comme a Orleans, c’etait le desir de faire une grande place
irreguliere qui portait a demander la destruction d’une e'glise tres-ancienne,
un de ces rares monuments antürieurs au xi° siede, comme on en voit si peu
dans la France centrale.
Heureusement, Monsieur le Ministre, en prenant a la charge de votre de-
partement l’acquisition de cet interessant edilice, vous le conserverez a une
ville qui, probablement, vous remerciera un jour d’avoir resiste a ses impre-
voyantes sollicitations.
Dans un moment oü les speculations industrielles preoccupent les esprils a
un si haut degre, on ose a peine plaider la cause des arts en presence de ce
qu’on nomine aujourd’hui les interets materiels. Mais, pourune nation comme
la nütre, la conservalion des grands Souvenirs, le respect des ceuvres d’art,
n’est-ce pas un devoir quelle ne doit jamais oublier? La Commission, Monsieur
le Ministre, n’hesitera jamais a s’elever de toutes ses forces contre les projets
qui sacrifieraient a de pretendues nücessites publiques des monuments anciens
et veneres.
Undes tracesproposes pour le chemin de fer de Lyon a Marseille supprime
la moitie des remparls d’Avignon. Ces vieilles murailles, couronnees de cre-