AGRICULTURE.
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tenus par une foi civilc et religieuse robuste, de rigoureux puritains, des
hommes bien considErEs et dans une bonne position sociale, et qui, s’ar-
rachant aux douceurs d’une existcnce large et assuree, vinrent, pour le
triomphe d’une iilEe, pour obeir ä un bcsoin purement intellectuel, s’ex-
poser a toutes les rigueurs de l’expatriation. La societe leur paraissait cor-
rornpue et asservie, ils l’abandonnerent pour en creer une nouvclle d’apres
leurs idees. Ces hommes durs, laborieux, aimant la vraie liberte par-
dessus tout et sachant la respecter cbez leurs semblables, essentiellement
pacifiques, ne poursuivant que le triomphe du vrai et du juste, s’atta-
cherent a la culture du sol, le defricherent, s’organisercnt entre eux, se
donnerent une Constitution en conformile avec leurs doctrines. Les pre-
miers Etablissements oii ils s’Etaient groupEs pour l’exercice de leur culte et
oli les mceurs patriarcales, avec la pratique d’une religion severe, regnaient
en souveraines, se devcloppercnt rapidement. Leur trop-plein donna nais-
sance a de nouveaux centres; ceux-ci se muitiplierent a leur tour et cons-
tituerent d’aulres Etablissements. C’etaient comme des essaims s ecbappant
continuellement de la ruche rnerc pour aller se fixer aillcurs, sans jamais
trop s’eloigner du centre ni perdre les traditions des premiers jours! L es-
prit puritain et independant se conserva religieusement, et les inslitulions
se modeierent partout sur les idees politiques et religieuses des premiers
colons.
La metropole n’y prit pas garde : eile avait bien aulrc chose a faire a
cette epoque; et le self-governmcnt devint la seule regle de ces hommes
habitues a ne compter qu’avec eux-memes et avec leur consciencc. On
conjoit ce que dut devenir la nouvclle colonie avec de tels elements et
avec des hommes de cette trempel...
Bien dilTerente fut l’evolution de la colonie francaise du Canada. Le
point de depart Etait le meine; la population au xvii 0 siede y comptait
le meme nombre d’individus; l’avenir semblait meme plus souriant a la
colonie franpaisc. La Nouvellc-France prEsentait, en eflet, des conditions
d’Etablissement plus avantageuses; le sol Etait plus riebe, les caux plus
poissonneuses; un magnifique lleuve, le Saint-Laurent, l’arrosait et la
meltait en communicalion avec d’immenses lacs intEricurs; le bois et les
productions naturelles y abondaient; une baic admirablement dotEe par
la nature en rendait l’acces facile. Malheureusement, les colons ne furent
pas des hommes de meme caractere, de meines aspirations et de meines
aptitudes que ceux de la Nouvelle-Angleterre.
Notre bistoire coloniale, il faut bien l’avouer, est gEnEralement aflli-
gearite. Ce ne sont que combats, abus et erreurs, des dEpenses Enormes,
des expEditions avenlureuses, des plans avortEs, une reglcmentation