INSTRUCTION PRIMAIRE ET INSTRUCTION SECONDAIRE. 457
une atteinle a ln libcrle, parce que la loi peut consacrer l’obligation natu
relle qu’ont les parents d’instruire, dans la mesure de leur condition, leurs
enfants, comme eile consacre celle de les nourrir. Elle pourrait devenir une
arme dangereuse entre les mains d’un pouvoir tyrannique, dit-on. Sans doute.
Mais, si un pouvoir avait quelque jour la force d’en abuser, qui donc l’em-
pecherait de letablir, en supposant quelle ne le füt pas encorc? II pour
rait non-seulement le faire, mais il serait peut-etre tente de s’en faire un
tilre a la popularite. Ce qu’il est bon de savoir, c’est que l’obligation ne
saurait faire dune nation ignorante une nation instruite. II y a aujour-
d’lnii un courant general qui pousse les gouvernements a la decreter. C’est
surtout en regardant rAlletnagne et la plupart des Etats protestants du
continent qu’on s’en est engoue. Mais ne voit-on pas que le protestan-
lisine, cn imposant a toul fidele 1’Obligation morale, bien autrement puis-
sante, de lire les saintes Ecritures, a ete pour beaucoup dans le progres
de I instruction et a prepare l’obligation legale; que les Etats catholiques du
sud de l’Allemagne ont ete entraines par la force de l’exemple? Que ne re-
garde-l-on l’Italie, qui doit plus a ses efforts qua sa loi, si peu observee,
de l’obligation? Que ne regarde-t-on l’Espagne, le Portugal, la Grece, la
Turquie meme, qui ont depuis longtemps inscrit l’obligation dans leurs
lois, et ou lignorance domine? Ce sont lesmceurs qui, en pareille matiere,
rendent les lois efficaces. Un pays dans lequel la majeure partie des babi-
tants dans presque toutes les communes ne sont pas convaincus qu’il vaut
mieuv envoyer regulieremcnl leur fils et leur lille a lecole que de leur
faire garder la vache, et ne pratiquent pas cette regle deconduite, est un
pays dans lequel la loi ne serait pas executee. Sans doute, l’obligation peut,
dans certains cas particuliers, exercer une influence licureuse : c’est [)our-
quoi il ny a pas lieu de la repousser d’une maniere absolue; mais cette
influence est tres-hmitee. Il est peut-etre facheux de voter une loi qui
devra etre trop souvent et ouvertement violee, et, en tout cas, il serait
dangcreux que les liigislateurs crussent, apres l’avoir votee, avoir para-
clieve l’neuvre de j’education publique. Ils seraient exposes a se reposer,
comme il est arrive a plus d’un administrateur, dans une illusion satis-
laite, et a preter moins d attention aux remedes utiles. J’aime mieux, dans
linieret de 1 instruction primaire, 20 millions de plus au budget que la
loi de Tobligation.
Los sommes consacrees a l’instruction primaire se sont d’ailleurs accrues
dcja dans une proportion tres-notablc depuis 18G8; et ces sommes (dies—
meines ne comprennent pas kUotalite des ressources dont, avcc les caisses
d’ecole, les liberalites privees, etc., disposc l’instruction primaire, et qui
parait depasser 80 millions de francs.