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REVDE DES DEÜX MONDES.
de constance. L’influence de la mode est predominante en pareil
cas. On ne se doute pas des excbs de travail qu’imposent les com-
mandes precipit6es, qui veulent toutes etre exöcutees ä bref delai.
Les patrons declarent avec quelque raison qu’il leur est impossible
de refuser des ordres, et qu’ils ne peuvent souvent etendre les li-
mites qu’on leur impose; mais l’ouvrier est dans son droit en vou-
lant que les heures supplementaires, cell es qui depassent la journee
ordinaire, soient payees au-delä du salaire habituel. Cette exigence
d’ailleurs est satisfaite dans beaucoup d’industries. II faut dire en
outre que la morte-saison tend ä s’amoindrir ou ä s’adoucir par le
developpement que prennent les industries de la confection, c’est-
ä-dire de la fabrication sans commande d’ouvrages de demi-luxe ou
de consommation generale.
Plusieurs des delegues ont assez d’impartialite pour reconnaltre
que depuis un quart de siöcle la lügislation industrielle et civile a
bte plusieurs fois remaniee en leur faveur. Gelui des typographes
enumere quelques-uns de ces changemens rücens. « Nous avons
obtenu, dit-il, les societes de secours mutuels corporatives (so
cietes qui auparavant n’etaient que tolerees), les chambres syndi-
cales ouvrieres, les societes de crödit mutuel, les associations coo-
peratives ouvrieres. le livret d’ouvrier devenu facultatif, l’abolition
de l’article 1781 du code penal, par lequel le maltre etait cru sur
parole, etc. » Parmi les conquetes que Signale ce dblegue, il y en a
qui ne sont pas definitives, et que la lögislation n’a pas encore re-
connues. En revanche, il en est d’autres qu’il oublie, teile que
l’abolition de la loi contre les coalitions. Quoique devenu facultatif,
le livret excite encore les plaintes d’un trös grand nombre de dele
gues. Tel qu’il existait, il n’etait pas bien gönant. Le patron ne pou-
vait y inscrire aucune remarque desobligeante : dans certains cas, il
rendait meme des Services ä l’ouvrier, il facilitait notamment les
prets et les avances que le patron pouvait lui faire; mais il consti-
tuait une Obligation spöciale au travailleur manuel et blessait sa
dignite. L’ouvrier ne s’accommode plus d’obligations legales qui ne
lui soient pas communes avec l’employe, l’artiste, l’avocat et le
medecin. Il faut prendre son parti de cette susceptibilitd, que jus-
tifient nos lois electorales. Il parait que le livret, qui n’est plus obli-
gatoire, est encore exige des votans pour les elections au conseil
des prud’hommes : le delegue des marbriers s’en plaint. Peut-etre
etait-ce simplement lä un moyen de constater la qualite et le droit
electoral de celui qui se pretendait dlecteur; nous ne voyons aucun
inc-onvönient ä ce qu’on supprime cette formalitö. Ce qui est moins
admissible dans les reclamations des ouvriers, c’est leur vive Oppo
sition aux reglemens d’ateliers. Hs ne comprennent pas ou ne veu
lent pas admettre, du moins dans l’industrie parisienne, qu’on ne