IES ASPIRATIONS DES OUVRIERS.
163
gantiers ont voulu faire de meine, mais les patrons n’ont pas ac-
cepte des relations aussi etroites; ils se sont contentes de decider
que l’ordre da jour de chacune des seances de la chambre patro-
nale serait adresse ä la chambre ouvriere, avec invitation d’envoyer
deux delegues. D’autres chambres syndicales ouvrieres sont plus
exclusives; sans se mettre completement en hostilite avec les pa-
Irons, eiles craignent de compromettre leur independance par des
relations regulieres et officielles avec eux.
II ne semble pas que jusqu’ici toutes ces petites societes soient
tres prospöres; presque tous les rapports se plaignent de la froideur,
de la negligence des ouvriers ä s’affilier ou ä payer leurs cotisations,
qui sont en general de 25 Centimes par quinzaine ou de 50 Centimes
par mois, contribution modique ä coup sür. II ne parait pas que
plus de la moitie des travailleurs de chaque corps d’etat ait adhere ä
ces associations; beaucoup d’entre eiles sont endettees soit par d’an-
ciennes greves, soit par une mauvaise gestion; celles des graveurs,
celles des marbriers sont dans ce cas. Les agens comptables n’ont
pas toujours ete irreprochables; la tenuc des livres n’est pas trös
connue dans ces petites societes. « Des delegues d’ateliers infidöles
ä leur mandat se sont appropries des cotisations et ont ensuite dis-
paru comme l’ombre. » C’est le rapporteur des marbriers qui parle
ainsi. Dans certaines de ces chambres syndicales, le bureau est
permanent et quelquefois n’a pas change depuis la fondation, chez
les orfevres par exemple; dans la plupart au contraire, il n’y a ni
President, ni vice-president, chacun Test ä tour de role; le secre-
taire seul est permanent. Toutes ces fonctions sont en general gra-
tuites, quelques-uns proposent de les remunerer.
On voit combien ces jeunes associations ont besoin d’efforts pour
arriver ä avoir des ressources et de la puissance; ä vrai dire, quel-
ques-unes sont d’un desinteressement, d’une fierte ou d’une impr6-
voyance singuliere. G’est ainsi que l’article premier des Statuts de
la chambre syndicale des coupeurs et brocheurs de chaussures de
Paris contient cette clause etrange : « la chambre syndicale s’in-
terdit toute acceptation de dons et legs. » Peut-etre n’y a-t-il li
qu’un renoncement tout philosophique ä des biens sur la venue
desquels ne comptaient guere les organisateurs de la societe. On
ne comprend pas pourquoi les chambres syndicales feraient vceu
de pauvrete; l’argent leur est necessaire, qu’elles n’hesitent donc
pas ä le prendre quand il leur arrive de bonne grace. Dejä, dans
plusieurs corporations la chambre syndicale a enfante une societe
de credit mutuel ou une societe cooperative de production; c’est
ce systfeme de generations successives qui doit former la nouvelle
methode d’emancipation du Proletariat. Le delegue des marbriers
raconte avec assez de details ce qui s’est passe dans ce sens au